Tout savoir sur la Bugatti Veyron

En 1998, Volkswagen rachète Bugatti. Très vite, EB118 est présentée, puis l'EB218. Elles sont toutes deux équipées d'un W18 de 6255 cm3, 72 soupapes. Ce bloc monumental est constitué de trois bancs de 6 cylindres ayant un angle d'ouverture de 60° entre chacun d'eux. Il délivre 555ch (à 6800 tr/min) et 649Nm (à 4000 tr/min) pour un poids de 315 kg et est accouplé à une boîte manuelle à 5 rapports.  

Le W18 des EB118, EB218 et 18/3 Chiron.

Fin 1999, la 18/3 Chiron est présentée au salon de Tokyo. Elle est équipée du même W18 que les EB118 et EB218 et repose sur un châssis de Lamborghini Diablo VT. La carrosserie est entièrement réalisée en aluminium, suivant le procédé ASF (Audi Space Frame). Mais le W18 est trop encombrant (hauteur très élevé) et trop coûteux à mettre au point.

Les ingénieurs vont donc développer un 16 cylindres, toujours dénommé "W" mais dont l'architecture diffère néanmoins de ses prédécesseurs. Car il s'agit non plus d'un bloc à trois rangées de cylindres, mais de deux V8 accolés à 72°. D'où l'appellation "double V". Ces deux V8 sont issus du VR6 et possèdent donc le même angle d'ouverture très réduit (15°) mais il présente des cotes d'alésage et de course spécifique. Le W16 est donc supercarré (86 x 86) tandis que le VR6 est typé longue course (84 x 95.9 pour la dernière exécution du VR6). Et, comme le bloc dont il dérive, le W16 est relativement compact puisque sa longueur (710 mm) est semblable à celle d'un V12 traditionnel.

Le W16 de la Veyron, dans sa version définitive.

La lubrification se fait par carter sec, conformément à se qui se fait dans la compétition et sur les modèles de série à vocation très sportive. Par ailleurs, les tiges de piston, fortement sollicitées, sont en titane. En outre, le W16 intègre un système de détection de ratés du moteur par courant ionique, permettant si besoin de retarder le point d'allumage.

Une autre spécificité du VR6 est qu'il n'est coiffé que par une seule culasse. Logiquement, le W16 est coiffé par deux culasses à quatre soupapes par cylindres (une par VR8), soit 64 soupapes au total. L'ensemble est suralimenté par quatre turbocompresseurs, dont la pression de suralimentation n'est pas connue. Mais à l'automne 2003, alors que la Veyron était censée être commercialisée, le bloc ne délivre que 650 ch, la faute à une pompe à essence inadaptée. 

Fin 2003, alors que le projet Veyron est au bord du fiasco, M. Schreiber prend la direction des opérations, avec une nouvelle équipe d'ingénieurs. Pas moins de 600 problèmes sont a résoudre. 

Printemps 2004, le tyrannosaure développe ses 1001 ch à 6000 tr/min et 1250 Nm entre 2000 tr/min et 5500 tr/min, pour un poids avoisinant les 400 kg. A titre de comparaison, le V10 de la Porsche Carrera GT pèse 205 kg, le V12 de la Ferrari Enzo affiche 225 kg tandis que le V12 BMW de la McLaren F1 pèse 266 kg. Le régime maximum s'établit à 6500 tr/min. M. Schreiber précise que "l'énergie totale libérée lors de la combustion atteint 3000 ch. Mais 1000 ch sont avalés par le système de refroidissement, tandis que 1000 autres sont perdus dans la ligne d'échappement". Impressionnant ! La consommation s'établit à un peu plus de 20 litres aux cent en utilisation normale, mais peut atteindre le litre par km !

Pour refroidir le W16, la Veyron compte pas moins de quatre radiateurs : deux grands, logés à l'avant, et deux plus petits, logés dans les passages de roues. Notons au passage que 55 litres d'eau transitent par ces radiateurs (40 litres pour les grands, 15 litres pour les petits). Enfin, quatre ventilateurs sont chargés d'évacuer la chaleur. Enfin, tout le haut moteur est à l'air libre. "Il est impossible d'arriver à refroidir parfaitement l'énergie développée par 1001ch" confie M. Schreiber. Le refroidissement fût l'un des principaux écueils rencontrés lors du développement de la Veyron. Car cette super-GT est une voiture conçue pour la route, et donc pour pouvoir évoluer à basse vitesse et par forte chaleur...

Ce W16 satisfait bien entendu aux normes de bruit et de pollution en vigueur. Le W16 émet 574 g/km de CO² et remporte ainsi la palme de la voiture qui émet le plus de CO², devant la Ferrari Enzo (545 g/km) et la Lamborghini Murcielago (500 g/km).

Qui a parlé d'usine à gaz ? :-D

Initialement, la Veyron devait être équipée d'une boîte séquentielle traditionnelle, semblable à celles qu'on peut trouver chez Ferrari. Compte tenu de la puissance phénoménale du moteur, les ingénieurs ont finalement opté pour une boîte à double embrayage, beaucoup plus douce.

Fabriquée en Angleterre par Ricardo, cette unité est capable de digérer plus de 1400 Nm et pèse 120 kg, dont 11 kg pour chaque embrayage. Les ingénieurs ont opté pour l'aluminium et un acier à haute résistance, le magnésium n'étant pas assez résistant. Quatre pompes à huiles sont chargées de lubrifier les deux disques d'embrayage avec un débit total de 35 litres d'huile par minute ! 

Les changements de rapports s'effectuent en 0.15 sec, ce qui n'a rien d'un record, mais sans aucune rupture de couple. Les accélérations se font donc sans aucun temps mort. Grosso modo, la première monte à 100 km/h, la 3ème à 200 km/h, la 5ème à 300 km/h et la 7ème à 400 km/h. Notons au passage, que cette boîte coûte plus de 100.000 euros à elle seule ! Cette boîte est accouplée à une transmission intégrale permanente, dont la répartition initiale du couple Av/Ar est de 30/70, mais qui peut varier. Elle est assurée par un embrayage Haldex placé derrière le différentiel avant. Le différentiel arrière est équipé d'un blocage transversal à lamelles. Les différentiels ont eux aussi été développés en partenariat avec Ricardo.

Si le concept car "Chiron" a été dessiné par Giugiaro, on doit le dessin de la Veyron à  Helmut Warkuss, responsable design chez VW.

Mais la Veyron devait aussi satisfaire à certaines exigences aérodynamiques. Or, comme toute GT qui se respecte, la Veyron a d'abord été dessinée ; son dessin n'est donc pas le fruit d'heures passées en soufflerie, contrairement à celui des supercars à vocation très sportive (McLaren F1, Ferrari Enzo)... ce qui a bien entendu engendré quelques difficultés. Pour améliorer les caractéristiques aérodynamique de la Veyron, les ingénieurs ont commencé par supprimer certaines trappes de ventilation que l'on a pu voir sur le concept car. Les autres ouïes de ventilation présentent une ouverture variable suivant la vitesse du véhicule : fermées à haute vitesse, afin d'améliorer le coefficient de pénétration, ouvertes à basse vitesse afin d'optimiser le refroidissement moteur.

Les ingénieurs ont par ailleurs développé trois modes de conduite : standard, handling et vitesse de pointe. En mode standard, la Veyron présente une hauteur de caisse de 125 mm, suffisante pour la circulation. Le Cx est alors de 0.39. En mode handling, la charge aérodynamique atteint 350 kg (150 à l'avant, 200 à l'arrière) à 375 km/h tandis que la garde au sol passe à 90 mm à l'avant et 80 mm à l'arrière et le Cx s'établit à 0.37. En mode vitesse de pointe, la garde au sol se limite à 65 mm à l'avant et 70 mm à l'arrière, le Cx passe à 0.36 et l'appui aérodynamique se voit très légèrement réduit (160 kg, toujours à 375 km/h). Ce mode nécessite d'insérer une seconde clé, prévue à cet effet, et nécessaire pour dépasser les 375 km/h.

Deux ailerons pour la Veyron. Le grand sert notamment d'aérofrein.

Initialement annoncée pour 1570 kg, la Veyron de série pèse finalement 1888 kg. Et il faut bien admettre que l'objectif initial était irréalisable compte tenu des choix techniques qui ont été retenus, et du traitement relativement luxueux de l'engin. La structure de la Veyron fait appel aux matériaux les plus nobles : structure tubulaire en aluminium, cellule centrale en carbone et berceau arrière en acier à haute limite élastique. Précisons au passage que le châssis monocoque est réalisé en Italie, par Dallara. Enfin, les pneumatiques Michelin utilisés par la Veyron sont totalement inédits et sont le fruit de cinq années de développement. Homologués pour atteindre 440 km/h, ils peuvent supporter plusieurs tonnes de pression par cm² et sont capables d'approcher la barre des 100° sans fondre.

Pour freiner une telle masse susceptible de surcroît d'atteindre des vitesses phénoménales, le système emprunté à Brembo s'est rapidement révélé insuffisant. Il a donc été développé une système de freinage adapté : disques en carbone-céramique SLG de 400 mm à l'avant et 380 mm à l'arrière. Les étriers de freins, en titane, ont été développés par AP Racing et comptent 8 pistons à l'avant et 6 à l'arrière. Cet ensemble est épaulé par l'énorme aileron arrière qui sert principalement d'aérofrein. Il permet des décélérations de 0.6g et engendre un appui sur l'essieu arrière qui peut atteindre 300 kg et donc améliorer sensiblement le grip. Résultat : le 100 à 0 km/h en 31.4m et le 400 à 0 km/h en 10 secondes. Les décélérations de la Veyron peuvent atteindre 1.3g.

Les énormes disques en céramiques reçoivent un système de refroidissement puissant.

A l'intérieur, c'est le luxe sans fioriture : on est loin du dépouillement d'une Ferrari F40, mais l'ensemble reste bien moins luxueux que l'habitacle d'une Bentley Continental GT. On retrouve ainsi des matériaux pleins de noblesse (cuir, daim, aluminium) tandis que l'habitacle étonne par son habitabilité. L'équipement comprend notamment un système audio de grande qualité (25.000 euros le morceau), un PALM permettant d'accéder aux données télémétriques, et un système de navigation minimaliste. "La Veyron est une incroyable voiture à conduire et non pas un showroom à gadgets" confie M. Schreiber. D'ailleurs, hormis la couleur de la carrosserie (bicolore obligatoire), la taille et le type des sièges ainsi que la couleur du cuir, il n'y a pas d'option sur la Veyron. On notera la présence d'une commande "launch control" permettant de faire des départs arrêtés de façon optimale.

L'habitacle de la Veyron : luxe et sportivité. Notez à gauche du compte-tours, l'indicateur de puissance.

Au printemps 2005, la Bugatti Veyron atteint les 410 km/h sur le circuit d'essai de Volkswagen de Ehra-Lessien. Cette performance remarquable a été approuvée par le Service de contrôle technique de l’Allemagne du Sud, le « TÜV Süddeutschland ». Cette valeur a été mesurée plusieurs fois, et dans les deux sens de marche.

En octobre, la Veyron atteint 415 km/h sur un lac salé de l'Utah, aux Etats-Unis. A ces vitesses là, la Veyron vide ses 100 litres de réservoirs en moins de 20 minutes.

Les chiffres d'accélération annoncés par Bugatti parlent d'eux-mêmes : 2.5s au 0 à 100 km/h, 7.3s au 0 à 200 km/h et 16.7s au 0 à 300 km/h. La barre des 400 km/h est pour sa part atteinte en 55 secondes !

La version définitive de la Veyron voit notamment sa calandre implantée plus bas que sur le concept car.

Aujourd'hui donc, la production de la Veyron a commencé. L'assemblage se fait à Molsheim, en Alsace, fief historique de la marque. Précisons au passage que l'assemblage d'une Veyron se fait par une équipe de cinq personnes et nécessite trois semaines de travail. Le programme de garantie est de 2 ans ou 50.000 km avec une assistance 24h/24. Toutes les réparations relatives au moteur et à la carrosserie se feront à Molsheim.

Pour les éventuels intéressé, un acompte de 300.000 euros + taxes est exigé, soit grosso modo 500.000 euros. Des broutilles quoi !

Lien vers la Fiche Technique.

 

 

©Absolute Cars - 2005/2007 - Automobiles de sport & de prestige